L’Afrique Festival 2022 en Alsace a tenu toutes ses promesses du 16 au 18 septembre à l’Espace Culturel Le Point d’eau à Ostwald. Ce rendez-vous majeur a de nouveau mobilisé du monde autour de la culture du continent africain.
En prenant le contrepied de la plupart des festivals où une programmation au masculin prédomine à 97% selon des statistiques françaises, le directeur de l’Afrique festival, Manouté Seri, a choisi une programmation à 99% féminine en nous proposant des combattantes de la musique comme Dobet Gnahoré, Charlotte Dipanda et Oumou Sangaré.
Ces femmes artistes ont eu bien des obstacles à franchir avant d’arriver au statut d’artiste reconnue internationalement. Sia Tolno a assuré la première partie de la soirée de clôture. Elle est originaire de Guinée Conakry et vient de s’installer en Alsace après un parcours personnel difficile mais elle a désormais des perspectives d’enregistrement d’un CD et d’une tournée à l’étranger entourée de ses jeunes musiciens français. Toutes ces femmes-artistes sont entrées en musique de façon quasiment mystique, tant leur détermination est forte et inébranlable.
https://youtu.be/qoHJ_wPbXXU
Dobet Gnahoré, la star ivoirienne, a assuré l’ouverture du festival le vendredi 16 septembre 2022. Un look bluffant et une plastique d’athlète, Dobet Gnahoré sait incarner la force et la grâce avec une présence scénique captivante. Elle est en perpétuel mouvement et a un sens inné de la chorégraphie. Son père, Boni Gnahoré, désormais installé en Alsace, a partagé la scène avec sa fille, un grand moment d’émotion.
Le samedi 17 septembre affiche en première partie Charlotte Dipanga du Cameroun. La note africaine de sa tenue de scène est un corsage décoré de cauris, ces petits coquillages connus dans toute l’Afrique et on lui fait cadeau du drapeau du Cameroun qu’elle porte à sa manière. Entourée de 4 musiciens et accompagnée d’un choriste et danseur, Charlotte Dipanda chante les valeurs de l’amour et ses tourments avec conviction. Un spectateur a même lancé une alliance sur la scène, le symbole d’une demande en mariage ! « Peu importe la personne avec laquelle vous avez choisi de vivre, l’essentiel c’est d’être heureux » dit-elle. Elle chante dans des tonalités très variées et danse à la camerounaise. Elle évoque les 160 langues de son pays d’origine mais prône l’union des peuples, les valeurs et les traditions partagées. Belle ambiance dans la salle avec un public conquis qui connait ses chansons, tout le monde danse, souvent avec un smartphone à la main pour capter cet instant musical unique. A la fin de son concert, Charlotte se rapproche du public, serre la main de ses fans, une proximité enfin retrouvée !
[caption id="attachment_21186" align="alignnone" width="1600"] Charlotte Dipanda a hissé le drapeau camerounais à L'Afrique Festival[/caption]
Changement de plateau pour le groupe des 4 musiciens de Sona Jobarteh, la célèbre soliste à la kora, originaire de Gambie. Place à la percussion avec des congas et un djembé, épaulée par le batteur et le bassiste avec lesquels Sona Jobarteh joue en duo avec une belle complicité musicale pendant le concert. Remarquable jeu de duo également avec le guitariste sahraoui, ensemble ils rivalisent en virtuosité. (Voir la vidéo ci-dessous).
L’élégance scénique de Sona Jobarteh est présente d’emblée lorsqu’elle arrive sur scène dans une splendide tenue colorée et brodée, de longues tresses lui caressant le dos et tenant sa kora avec aisance dans ses mouvements. Elle joue puis elle chante d’une voix plutôt grave, mais aussi pour s’efforcer d’exprimer en français ce que la musique représente dans sa vie. Elle s’enquiert de savoir qui comprend l’anglais dans la salle pour expliquer au public son engagement dans des projets éducatifs en Gambie, notamment l’éducation musicale pour les filles : « L’éducation est à la base de tout développement dans un pays et notamment en Afrique dit-elle. « La Gambie est désormais indépendante mais elle doit changer son système d’éducation et se l’approprier en se libérant de l’influence coloniale par l’expression de la culture qui lui est propre ». Elle rend hommage à l’histoire de l’empire mandingue, à la culture musicale Foula mais aussi à sa grand-mère qui symbolise à ses yeux la force des femmes.
Après avoir posé sa kora, Sona Jobarteh nous fait cadeau d’un solo et d’un duo à la guitare. Le public applaudit son talent avec enthousiasme et à tout moment, elle est en dialogue avec ses musiciens mais surtout avec le public. L’émotion est forte sur scène et dans la salle. Sona Jobarteh a conquis les cœurs et dédicacera de nombreux CD à la sortie de son concert.
Dimanche, jour de clôture, c’est la chanteuse malienne, Oumou Sangaré que les fans attendent. Elle arrive sur scène avec une stature de diva aux pieds nus comme Césaria Evora. Oumou s’entoure de jeunes musiciens, et danseuses-choristes à qui elle offre un tremplin par sa notoriété.
Oumou Sangaré parle peu avant ses morceaux, sauf pour dire à un moment donné que « toute personne doit savoir être seule, car la vie est ainsi ». Elle ouvre la scène à toute manifestation spontanée de personnes qui viennent s’exprimer en dansant pour elle, avec elle. Ses jeunes musiciens partagent son enthousiasme et assurent des enchainements sans faille d’un morceau à l’autre. Les deux danseuses et choristes font partie intégralement de la performance scénique et musicale. Les Maliens et Maliennes dans le public dialoguent directement avec Oumou et le public est transporté par l’émotion qu’exprime cette grande artiste. Le concert se termine dans un bonheur partagé. « Vous n’avez pas oublié la danse du pays » dit-elle à ses fans montés sur scène.
L’Afrique Festival, c’est aussi dès l’arrivée dans le hall de l’espace culturel Le Point d’eau, une promesse de voyage en terre d’Afrique. Ainsi, Village d’Afrique fait découvrir au public l’artisanat en provenance de divers pays d’Afrique, représenté par des vendeurs originaires du continent africain et installés en France ou en Allemagne. Des plats africains à base de viande et de poisson peuvent être dégustés sur place pendant toute la durée du festival.
[caption id="attachment_21191" align="alignnone" width="2048"] Le "Village" de L'Afrique Festival 2022 était riche et varié/Crédit photo : Rita[/caption]
Le bar propose de la bière africaine et de la bière locale, du vin blanc et du crémant alsaciens. Des ateliers musicaux sont prévus pour les adultes et les enfants, comme l’atelier de percussion de Boni Gnahoré ou un atelier de chant gospel kids d’Alfonso Nsangu-Cornu pour les jeunes de 6 à 15 ans et enfin un atelier de danses traditionnelles animé par la chanteuse ivoirienne Dobet Gnahoré.
[caption id="attachment_21185" align="alignnone" width="1600"] Les bénévoles de L'Afrique Festival ont assuré//Crédit photo : Rita[/caption]
L’Afrique Festival, qui a lieu en septembre, s’inscrit dans la rentrée culturelle de l’Espace culturel du Point d’eau mais aussi dans le climat d’incertitude actuelle et il aurait mérité un public plus nombreux pour cette programmation d’exception et des instants de musique inoubliables.
Charlotte Dipanda a hissé le drapeau camerounais à L'Afrique Festival[/caption]
Le "Village" de L'Afrique Festival 2022 était riche et varié/Crédit photo : Rita[/caption]
Les bénévoles de L'Afrique Festival ont assuré//Crédit photo : Rita[/caption]
