Votre semainier (Le Populaire) est allé à la rencontre de Sita Camara, journaliste, directeur du site Sitanews.org et acteur culturel de la diaspora guinéenne de France, pour recueillir son avis et ses observations sur la nomination du journaliste, chroniqueur et communicant Moussa Moïse Sylla au poste de ministre de la Culture, du Tourisme et de l'Artisanat. Lisez !
Tidiane Diallo : Bonsoir Sita Camara. Vous avez suivi comme de nombreux autres guinéens, la nomination du nouveau gouvernement. Que pensez-vous du nouveau ministre de la Culture ?
Sita Camara : Bonsoir Tidiane. D’abord, je salue la décision prise de dissoudre tout le gouvernement guinéen en réponse aux occupations récurrentes de la population concernant la gestion publique. Il était impératif voir urgent d'apporter un renouveau à l’ossature gouvernementale pour répondre aux attentes du peuple. Particulièrement, je souhaite adresser mes vives félicitations au nouveau ministre de la Culture, Moussa Moise Sylla qui aura évidemment du pain sur la planche. Cela ne remet pas en question les actes posés par son prédécesseur, mais il est évident qu'il n'avait pas encore totalement comblé les attentes de l’ensemble des acteurs du secteur culturel. Ce décret traduit donc une nouvelle opportunité de relever les nombreux défis. Nous sommes impatients de voir les progrès et les initiatives qu'apportera ce nouveau ministre.
Ce qu’il faut aussi savoir, c’est que Moussa Moïse à une certaine lecture de la sphère culturelle du pays. Dans le temps, il a su développer une certaine accointance avec les acteurs culturels quand il était à la DCI. Sa venue à la tête du département de la culture n’est pas fortuite. Le Président estime que c’est la personne qu’il faut pour établir une véritable politique pour pouvoir sortir le secteur culturel du bourbier. Je crois que nous devons aussi lui accorder ce crédit.
Ce ministre possède-t-il le profil adéquat pour diriger cette institution, souvent considérée comme parent pauvre de l’action gouvernementale ?
Je pense qu’il est prématuré de porter un jugement. Il est trop tôt pour émettre une appréciation. Nous lui accordons le temps de travailler. Nous espérons qu'il sera à la hauteur. En tant que journaliste, je le surveillerai attentivement. Dans 6 mois, nous serons là pour éplucher ses premiers résultats.
Quelles sont, selon vous, les grandes lignes auxquelles il doit s'atteler dans ce contexte exceptionnel ?
Je recommanderais qu'il commence par organiser les états généraux de la culture afin d'écouter les parties et de prendre en considération les difficultés rencontrées par les divers secteurs culturels. Ensuite, ce ministre devrait assumer plusieurs responsabilités clés, telles que la promotion et le soutien des arts et de la culture sous toutes leurs formes, en encourageant la créativité et l'expression artistique, y compris le soutien aux artistes et aux institutions culturelles surtout privées.
Il doit également s'engager à rendre la culture accessible à tous. Cela peut se concrétiser à travers des programmes éducatifs, des subventions, des politiques publiques favorisant l'accès à la culture et la promotion de la diversité culturelle. En ce qui concerne les infrastructures, le temps est compté car nous sommes en période de Transition. Cependant, ce nouveau ministre pourrait jeter les bases d'un programme de construction d'espaces de création et de production. Pour y parvenir, il devrait être capable de défendre des propositions de budget conséquentes au Conseil des ministres et au Conseil national de Transition (CNT).
Quel bilan dressez-vous de la gestion de l’ancien ministre de la Culture, du Tourisme et de l’Artisanat Alpha Soumah alias Bill de Sam ?
Pour être honnête, je ne peux pas tout peindre en noir. Alpha Soumah a réussi à faire quelques réformes, notamment la mise en vigueur de la loi sur la protection des œuvres littéraires et artistiques, ainsi que la copie privée. Cependant, un accord a été signé avec la direction générale des Douanes pour la perception de la rémunération pour copie privée et la reprographie des œuvres fixées sur support graphique ou analogique, et la mise en œuvre du droit d’importation des œuvres littéraires et artistiques. Ces mesures verront forcément un impact positif sur les droits d'auteur.
D'autres actions entreprises par le ministre Bill de Sam incluent l'élaboration des statuts des directions en charge de la Culture, la réhabilitation en cours du musée de Sandervalia avec un projet d'extension. À cela s’ajoute l'adoption d'une loi sur le statut des artistes et des hommes de culture, la finition du centre multiculturel de la Ma-maya à Kankan, la construction d'infrastructures touristiques telles qu'un village écotouristique, une école de balafon et la réhabilitation du Fort Gallieni à Niagassola.
Pensez-vous qu'il est nécessaire d’avoir un ministre politique à la tête du département chargé de la culture ou des affaires culturelles pour promouvoir la culture guinéenne à l'échelle mondiale, à l'image de nos frères africains du Nigéria, de la République démocratique du Congo, de la Côte d’Ivoire, du Sénégal, du Mali par exemple ?
À ce stade, la Guinée requiert un ministre pragmatique, visionnaire et compétent en gestion. Peu importe que sa provenance soit la société civile, le monde de la culture ou de la politique, etc. Il est temps d'agir plutôt que de faire de beaux discours, car d'importantes réformes sont urgentes. La Guinée a besoin d'un ministre de la Culture capable de mettre en œuvre rapidement des réformes importantes et de revitaliser le secteur. Il est important de se concentrer sur l'amélioration des infrastructures culturelles et la promotion des activités culturelles à l'échelle nationale et internationale. Le profil idéal pour ce poste devrait avoir une solide expertise en culture ainsi que des compétences avérées en gestion et en leadership.
Entrevue réalisée par Tidiane Diallo
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