Retour surprise et comeback attendu : Booba sort de sa retraite et propose un onzième album, Ad Vitam Aeternam. Revue de détail.
Il l’avait juré avec Ultra : ce dixième album était son dernier. Grosse différence entre la politique et l'entertainment : personne n’en a jamais voulu à un artiste de revenir après avoir annoncé sa retraite. Dont acte avec AVA, onzième album marquant le retour de "Papounet", surnom que Booba s’octroie dans Rebel vu que "Le rap français c’est oi-m (ui-l, ndr)".
Pour Booba, ça a commencé avec un single digital en juin 23, puis deux, puis trois… Et c’est ainsi que, trois ans après Ultra, arrive le onzième album de Kopp, Ad Vitam Aeternam, dix titres, 28 minutes 33 (douche comprise) au compteur, avec GM comme seul morceau qui s’approche des 3’30 (3’28 pour être précis). Preuve que B2O vit avec son temps, celui de la "disparition du troisième couplet" et du raccourcissement des sons imposé par la culture stream.
On le sait, Booba fonctionne mieux dans le conflit. Et s’il n’a pas assez d’ennemis, il va s’en fabriquer : ici ce sont les footballeurs qui sont visés, de Kylian Mbappé à Éric Abidal, tous deux cités dans Abidal, nouvelles cibles aux côtés des usual suspects que sont les "influvoleurs" représentés ici par Maeva Ghennam et Marc Blatat (évoqués dans 6G), Dem Dem la femme de Gims (dans Dolce Camara), Geraldo du label 45 Scientific (sur Rebel) ou Damso dans Sport Billy ("100 moins 8 zoo, très loin de Damso").
Avec une trentaine d’années de carrière dont une grosse partie sur l’Himalaya du rap d’ici, logique que l’égo trip désabusé abonde, avec des références à ses propres textes ("C’est pas le rain-té qui me quitte" dans Signé, comme un écho de "C’est pas le quartier qui me quitte" dans DKR).
On retrouve l’affirmation une nouvelle fois réitérée de sa misanthropie ("J’aime pas l’humain, tu le sais très bien"dans CVBSP), de l’humour psychotrope ("Sous champi comme Mario Bros."), des punchlines acérées ("Les larmes sont halal, le sourire est kabyle" dans Dolce Camara, "La haine d’un orphelin, la dalle d’un haraga" dans Saga), bref, tous les fondamentaux sont au rendez-vous. On note également que Booba a quasiment abandonné l’Auto-tune, en tout cas son usage quasi systématique qui caractérisait ses derniers projets.
REGARDEZ LE CLIP "SAGA"
Da Over, producteur du single de 2022 Variant, est aux manettes sur le titre final, CVBSP, et le reste de l’album est produit par des beatmakers de la nouvelle génération, encore peu identifiés, comme Yaya OnTheTrack pour GM et Tysko sur Dolce Camara. Quatre des invités font partie de la famille 92i, à savoir SDM sur Dolce Camara, Usky sur Bénigni, Sicario sur Abidal et Gato sur GM, qui accueille aussi le flow du chanteur martiniquais Evil P.
Booba est donc bien de retour, avec quelques concerts et festivals à la clé, dont fin août le Rose Festival lancé par Bigflo et Oli qui lui offre la tête d’affiche aux côtés du barde d’Astaffort Francis Cabrel, que Booba a samplé sur 6G. Un duo Francis/Kopp ? "Est-ce que ce monde est sérieux ?"demandait Francis dans La Corrida, la chanson samplée où il se mettait dans la peau du taureau. On verra bien. Et pour ceux que le retour du Duc froisse encore, il a la réponse : "Y’a pas mort d’homme, 6G, nouvel album, y’a pire comme attentat".
Welcome back, Kopp.
Booba Ad Vitam Aeternam (Tallac Records) 2024
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