Salut AZAYA ! Bonne fête de la musique à toi. Dis-nous, que représente la musique dans ta vie ?
« Elle m’a tout donné»
La musique est dans tout ce que je fais. La musique m’a tout donné. Tout ce que j’ai, et ce que je suis aujourd’hui, c’est grâce à la musique. Donc, elle est toute ma vie.
Tu as lancé ta carrière en 2014. Aujourd’hui, comment tu perçois ta musique en termes d’évolution ?
Je sens que ça évolue beaucoup. De 2014 à maintenant, je peux dire Al hamdoulillah [Dieu soit loué NDLR]. Puisque chaque année, je me vois à un autre niveau. Je vois que ma carrière progresse considérablement. Aujourd’hui, je suis en train de me battre pour m’imposer dans les pays de la sous-région- et déjà, ça marche bien pour moi.
Justement, parlons-en. Comment est perçue ta musique hors de ton pays ?
« Je veux faire écouter ma musique par le monde entier (…) »
Aujourd’hui, la sous-région commence à accueillir ma musique, à m’écouter, et à m’inviter dans ses différents concerts et festivals. Je pense que c’est le fruit du travail. Vous savez, la musique n’a pas de frontières. Il faut aller au-delà de l’imagination de tes fans. C’est pourquoi, je travaille jour et nuit. Je sais que je suis juste à mes débuts. Mais mon objectif, c’est de faire écouter ma musique partout dans le monde.
Quelques années après le lancement de ta carrière, tu as tout de suite pensé à mettre en place, ton propre label : Musique 100 Frontières - MSF. Aussitôt, tu as signé ton épouse (Djelikaba Bintou Kouyaté), ta petite sœur (Ibro Gnamet) qui sont aussi célèbres en Guinée. Voulais-tu protéger l’héritage musical familial ?
Au moment où on venait de s’imposer dans la musique, le seul problème de nos artistes était un manque criard d’organisation. Les artistes n’avaient pas de structure autour d’eux. Il n’y avait plus de maisons de production. Alors que moi, je voudrais faire de la musique sous forme d’entreprise. Donc, il fallait d’abord mettre une structure autour de moi, créer un label. J’avais compris que pour aller si vite et bien, il fallait être autonome. C’est tout ce qui m’a motivé à créer Musique 100 Frontières. J’ai commencé à produire mes propres albums. Après, j’ai fait signer ma petite sœur et ma femme. Il y a Spaik [talent guinéen NDLR] qui a aussi signé. A un moment, j’ai également collaboré avec le groupe urbain Instinct Killers.
Sous la bannière de mon label, on a signé beaucoup de jeunes artistes dont je ne vais pas dévoiler le nom ici. Ces artistes font souvent la première partie de nos concerts. Pour moi, il est nécessaire de créer cette structure et donner à chacun, ce qu’il sait faire. J’estime que c’est le résultat de toutes ces stratégies qui m’a permis de m’imposer jusqu’à maintenant.
Comptes-tu sur ton label Musique 100 Frontières pour propulser ta carrière et celle de tes artistes à l’international ?
Ce label n’est que local. Mais, nous sommes en collaboration avec d’autres majors dont : Keyzit.
Quelle est la nature de ce contrat ?
Avec cette maison, on a signé un contrat de distribution et d’édition. C’est comme ça que nous travaillons pour le moment. Peut-être que d’autres grosses maisons de production vont s’intéresser à nous- et puis voilà, c’est petit à petit.
Musicalement, qui est ton repère, AZAYA ?
En Guinée, mon repère c’est Sékouba Bambino Diabaté et Mory Kanté. En Afrique, c’est Salif Keita.
Musicien au départ, chanteur plus tard, ensuite, arrangeur - producteur. AZAYA est-il un artiste complet et indépendant?
A peu près, oui ! [Rires]
Quel est ton rêve le plus fou ?
« (…) Je veux être un artiste interplanétaire… »
Mon rêve le plus fou, c’est d’être un artiste interplanétaire, affronter des grandes scènes du monde. Je veux aller au-delà de l’imagination de mes fans. Je veux me retrouver un jour avec les grandes stars du monde. Ensuite, faire des collaborations de ouf. Tant que je vis, je me battrai pour aller plus loin. Je veux être un artiste connu de toute la planète terre. Voilà mon rêve SITA.
Ton double album, parle nous-en.
Justement, c’est un double album. L’un est afro-acoustique mandingue et l’autre est afro pop mandingue. Je crois que la plupart de mes feats se retrouveront sur l’album afro-pop mandingue. Pour l’instant, nous sommes en pleine discussion avec Keyzit en ce qui concerne le choix des feats. Sinon, il y a mes collaborations avec Sidiki Diabaté, Eddy Kenzo, Demarco, avec Mix 1er, Soum Bill, Ariel Sheney de la Côte d’Ivoire. J’ai aussi deux collaborations au Nigeria, notamment celles avec Chidinma et Gnawa.
En gros, que racontes-tu dans ton double album ?
Ce double album est beaucoup plus instructif. Les messages sont très intéressants. Vous pouvez prendre l’exemple sur le titre « Où va ce monde ? ». Cette fois-ci, j’ai conscientisé. Il faut que ce double album laisse un impact sur la société. Donc, il y a beaucoup plus de chansons instructives que celles d’amour.
Associer ton histoire de couple à ta musique aux débuts de ta carrière, a-t-il été une manière pour te frayer un chemin ?
« Je n’ai jamais associé ma musique à ma vie de couple ».
Bon, ma vie de couple n’a jamais été associée à ma musique. Disons plutôt que les fans, les gens, ont associé les deux. Sinon, je n’ai jamais associé ma musique à ma vie de couple.
AZAYA est souvent au cœur des polémiques et au centre des critiques à Conakry. Comment vis-tu tout cela au quotidien ?
Ce sont les conséquences de la célébrité et les effets d’être une star. C’est d’être à l’épicentre du buzz. Il y a beaucoup de choses qui se passent sur les réseaux sociaux, moi-même je ne sais d’où ça vient. Je n’ai jamais créé de buzz autour de moi. Mais je me retrouve au centre du buzz. Donc, je regarde comme tout le monde. Chacun dit ce qu’il veut sur moi. On est dans le monde des réseaux sociaux. Chacun est libre d’interpréter la vie d’un artiste comme il veut. Chacun est libre de dire ce qui lui semble bon. Mais, de toutes façons, un artiste aujourd’hui c’est comme une marque, parlez-en en bien, parlez-en en mal.
Ne penses-tu pas que la musique guinéenne actuelle est trop influencée par les tendances étrangères ? Les artistes guinéens n’en font pas de trop ?
Le problème est que moi, je ne comprends pas souvent : quand les gens disent que la musique guinéenne a changé, ou bien, les artistes ont abandonné le rythme guinéen. Chose qui n’est pas vraie. Jusqu’ici, nous faisons de la musique guinéenne. Mais la musique est devenue aujourd’hui tendancielle. Même si nos aînés étaient encore dans la musique, ils allaient faire de la même manière que nous faisons aujourd’hui. Puisque les choses ont changé. On ne s’habille plus comme avant. On ne mange plus comme avant. On ne marche plus comme avant. On ne chante plus comme avant. On ne fait plus de la musique comme avant. Ça, c’est dans tous les pays du monde. La musique a évolué et les regards ont changé.
Le monde s’adapte à la nouvelle tendance. Et c’est à chaque artiste de voir à son niveau, comment métisser le folklore national à cette nouvelle tendance. Par exemple, l’afro pop, c’est ce que nous sommes en train de faire actuellement. C’est-à-dire, adapter la musique mandingue à la nouvelle tendance. Et je vous assure, c’est ce qui fait qu’aujourd’hui, nos jeunes artistes sont en train de sortir la tête de l’eau, et de se faire écouter en dehors du pays.
Même la musique congolaise a quasiment changé de nos jours. Ce n’est plus la rumba qu’on écoutait avant. De même pour la musique sénégalaise. Écoutez maintenant la chanson de Viviane Chidid, c’est de l’afro Mbalax. Ensuite, Quand tu pars en Côte d’Ivoire, tout a presque changé. D’ailleurs, là-bas, c’est le rap qui a pris le devant actuellement. C’est parce que ce rap-là est devenu de l’afro.
Le cas guinéen, ce n’est pas une question d’abandonner le rythme du terroir. Mais c’est comment le mettre au goût du jour.
Mais qu’est-ce que tu déplores ?
Ce qui est juste un peu dommage, c’est l’absence de quelques instruments traditionnels dans la plupart des morceaux. Sinon, il y a beaucoup d’artistes qui jouent le rythme traditionnel, mais si ça ne marche pas, que voulez-vous qu’on fasse ?
Qu’est-ce qu’il y a lieu de faire ?
«…Il est temps que nous imposions notre folklore (…) »
Il faut une complicité entre le public et les artistes. Je dirai qu’il est temps pour la Guinée d’imposer sa musique. Car, les autres pays ont réussi à le faire. Mais ce combat en Guinée, n’est pas seulement pour les artistes. C’est pour tout le monde. C’est pour les artistes, pour le public, et pour tous ceux qui écoutent de la musique.
A quel niveau se trouve le hic ?
Aujourd’hui, si nous n’arrivons pas à imposer ce folklore guinéen, c’est parce que peut-être, on a un public qui ne demande pas ce folklore. Alors, si ensemble, les artistes et le public décident de s’imposer à eux-mêmes, leur propre identité musicale, je pense qu’on peut y arriver. Alors, cher public, chers fans, privilégions nos rythmes et imposons notre folklore à nous-mêmes. Et forcément, les autres suivront. C’est la seule façon pour nous de briller ailleurs dans le monde.