Scène guinéenne à Station Afrique - JO/Crédit photo Sitanews
Publié : 10 August, 2024

"Station Afrique" : une vitrine pour la Guinée, mais à quel prix ?

 

[Grand dossier] Quand la "fan zone Afrique" fait débat sur l'utilisation des fonds publics guinéens, dans un contexte où le pays traverse une tempête économique et sociopolitique ! Sitanews vous en dit plus. Suivez notre plume.

 

La décision des autorités guinéennes de participer à "Station Afrique" des Jeux olympiques de Paris 2024 soulève des questions sur l'utilisation des fonds publics. La Guinée devait-elle se le permettre ? Est-ce un mirage olympique ? Les langues se frisent et se délient. À en croire à nos sources, une dizaine de milliards de francs guinéens sont débloqués et qui seraient partagés entres les "copains" d'un même clan. 

 

D'un côté, les autorités affirment que cette présence à "Station Afrique", offrira une visibilité internationale à la Guinée. Mais d'un autre côté, certains Guinéens s'interrogent sur l'opportunité de ce type de dépenses, alors que le secteur culturel fait face à de nombreux défis.

 

« Combien de projets culturels meurent dans le pays faute de subventions ou de financement ? Mais elles (autorités culturelles NDLR), préfèrent se la couler douce en France pour une participation de seulement quelques jours », nous dit Youssouf Mohamed David Keita, opérateur culturel.

 

Les coûts liés à cette participation - billets d'avion, hébergement, cachets - suscitent des interrogations sur l'allocation des ressources publiques.

 

« Combien de personnes sont parties pour cet événement ? C'est beaucoup d'argent concernant les transports, les per-diems et autres dépenses. On aurait pu économiser cet argent pour d'autres fins, surtout à un moment où les Guinéens tirent le diable par la queue », nous laisse entendre un autre acteur préférant s'exprimer dans l'anonymat.

 

Des voix s'élèvent pour demander que ces fonds soient plutôt investis dans des projets culturels pérennes, qui bénéficieraient directement aux acteurs de terrain en Guinée.

 

Cependant, les autorités défendent leur dynamique, affirmant qu'elle s'inscrit dans une stratégie de rayonnement international du pays.

 

Certains acteurs culturels, notamment dans la diaspora, regrettent toutefois de ne pas avoir été davantage associés à ce projet au nom de la Guinée.

 

« Ils sont venus en Europe, ils savent que nous existons bel et bien, mais ils ont préféré gérer ce projet à leur niveau sans nous associer. Cela veut dire que si nous ne vivons pas en Guinée, nous ne sommes pas pris en compte. On estime que c'est un manque de considération », déplore Ansoumane Da Sylla, promoteur culturel guinéen en France.

 

À Conakry, la frustration est encore de taille. Certains artistes non associés se font entendre dans les médias et sur les réseaux. « Dans ce pays, tout ce fait par clientélisme et par clanisme. Si tu n’es pas avec eux, dans leur cercle ou dans leur esprit, tu n’es jamais associé à leurs gombos (Affaires NDLR). D’ailleurs je préfère ne pas dire mon nom au risque d’être blacklisté davantage », nous affirme un (très) célèbre chanteur guinéen.

 

Au-delà des aspects financiers, la participation de la Guinée à "Station Afrique" soulève également des interrogations sur les retombées réelles d'un tel événement éphémère. Certains estiment que ces ressources auraient pu être mieux utilisées pour soutenir des initiatives locales plus ancrées dans le tissu culturel du pays. 

 

Nous y reviendrons pour plus de détails sur cette sulfureuse affaire.

 

Sita Camara

Sitanews, France

 

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