Reportage de Rita STIRN pour Sita News, récompensé à la remise des Prix par un trophée, réceptionné par Monsieur Sita Camara.
La 6e édition de la Nuit de Diaspora africaine est organisée les 6 et 7 décembre 2024 par L’Association des Amis de Strasbourg pour l’Entraide, l’Éducation et la Culture (LASEEC), fondée par Alain Bouba en 2018.
Deux temps forts sur deux jours : le 6 décembre 2024 à l’Hôtel Voco pour une soirée de conférence-débat dont le thème est « Relever la flamme de nos origines croisées, ponts jetés entre ici et autre part ».
Le 7 décembre 2024 à la Salle Lafayette où se déroule en soirée la remise des prix aux acteurs méritants de la diaspora, dans une ambiance festive avec DJ et dance floor jusqu’à l’aube.
Les membres du panel de la conférence du vendredi 6 décembre offrent des profils d’universitaires, d’élus politiques et d’ acteurs sociaux et culturels : Sully Quay, autrice, comédienne et professeure d’anglais, Bernard Jenaste, Professeur interprète de conférence, coordinateur de projets européens, élu à la mairie de Schiltigheim, Érick Cakpo, Docteur en Histoire des Civilisations, enseignant-chercheur à l’Université de Lorraine, adjoint au Maire en charge de la culture à Sélestat, Yves Wansi, aventurier social et solidaire des Malvoyants, co-fondateur des associations Entendre et voir et Vue d’Ensemble, Marilyn Modica, travailleuse sociale, directrice artistique de l’association Collectif Sirani, organisatrice d’évènements autour des arts et cultures d’Afrique de l’Ouest, Prisca Mbenkoé, Chargée d’affaires en Banque, présidente de l’association Afriqu’elles. La modération du panel est assurée par Élodie Ngambi-Page, cadre dans un organisme social.
Photo des panélistes
À tour de rôle, les panellistes s’expriment sur leur parcours de vie, le rapport à leurs origines et la notion d’identité. Yves Wansi évoque son héritage du Cameroun où la personne handicapée est intégrée dans la société et il garde cette approche inclusive dans son engagement social. Il cite ses projets organisés pour les malvoyants tels que des randonnées en terres lointaines où un malvoyant peut marcher sans obstacle comme sur la banquise contrairement aux trottoirs de la jungle urbaine. L’idée de la marche est une stratégie pour sortir de chez soi et d’éviter la sédentarité à cause du handicap. L’association Vue d’Ensemble milite pour rendre les lieux culturels accessibles, réunir voyants, malvoyants et malentendants pour assister à des concerts et des pièces de théâtre ensemble, grâce aux technologies actuelles.
L’autrice, Sully Quay, explique comment ses diverses expatriations l’ont amenée à l’écriture. Lorsqu’elle résidait en Pologne, elle s’est interrogée sur la présence des Noirs Afro-descendants dans les camps nazis et a entrepris des recherches dans ce sens. Parallèlement, ses origines togolaises et la découverte de la Maison des esclaves l’ont incitée à un questionnement sur les ancêtres esclavagistes africains et à une lecture factuelle africaine de l’esclavage. « La volonté d’écrire pousse à se poser des questions » dit-elle. Érick Cakpo s’exprime en historien sur le métissage à travers les siècles et par rapport à son expérience personnelle. Avec un père originaire du Bénin et une mère guadeloupéenne, il affirme : « le métissage est un enrichissement au cœur de ma vie et de ma recherche scientifique ». Il précise que « les biologistes savent bien qu’il n’y a pas d’origine pure et que nous sommes tous issus de mélanges et de branchements ». Bernard Jenaste, universitaire et élu politique, parle d’identité rhyzome, une identité qui existe en profondeur mais qui n’est pas communautariste : « Si on reste un groupe d’Afrodescendants, on n’ira pas loin (…). Nous devons dépasser notre épiderme et savoir d’où on vient, où on va et qu’est ce qu’on veut faire ». Il se dit avide de sonder son héritage mais souhaite le transformer en disant qu’il lit aussi bien Frantz Fanon que Goethe en précisant que son épouse est allemande. Il porte l’écharpe tricolore comme Adjoint au Maire depuis 2018 et raconte qu’il a trouvé des croix gammées sur sa maison. Mais son ambition politique reste intacte et il envisage de se présenter comme député du Parlement européen. Marylin Modica est fille d’émigrés italiens, de parents qui ne lui ont pas appris leur langue. Elle a grandi à Abidjan et se sent alignée lorsqu’elle retrouve la terre d’Afrique, les odeurs et sensations de son enfance. Elle est passionnée de danse et de musique d’ Afrique de l’Ouest et évoque l’héritage de l’empire mandingue. Elle souligne la diversité des cultures du continent africain : « Parler de danse africaine est réducteur, c’est un lexique lié à une vision européocentriste de la culture africaine ».
Quant aux questions du public, un participant demande : « Il faut être fier de ses origines, qu’en pensez-vous ? Erick Cakpo répond que nous avons besoin d’ancrage et cite Edgar Morin qui s’interroge sur l’unité et la multiplicité de l’être humain en prenant son exemple personnel : français, d’origine juive sépharade, ancré dans l’histoire de l’espace méditerranéen et celle du continent africain par l’expulsion des Juifs d’Espagne en Afrique du Nord. Érick Cakpo insiste sur le fait qu’il n’y a pas d’identité fixe, les identités sont en mouvement.Selon lui, la construction de l’identité se fait dans un contexte et il faut se co-construire par rapport au lien que nous avons les uns avec les autres. Un autre membre du public d’origine peule précise que les Peuls ne sont pas originaires d’un seul pays et qu’il ne faut pas confondre origine et identité et il met l’accent sur l’identité culturelle.
Une autre question cruciale de la part du public s’articule autour des enfants. Érick Capko répond : « Il faut que les enfants lisent et se cultivent ». La relation au pays d’adoption, les enfants nés de deux cultures, que préconiser dans la transmission ? Nos enfants vont chercher à construire leur identité, ils se construiront dans la culture dans laquelle ils se sentent le plus à l’aise. On peut parler d’une identité métisse ». Élodie Ngambi-Page, la modératrice du panel insiste sur « la valorisation des divers secteurs d’activité et de créer un focus sur la question féminine pour partager nos parcours et nos expériences, avec nos enfants ». Prisca Mbenkoé, présidente d’Afriqu’Elles souligne le besoin de connaitre les parcours de pionniers et pionnières qui étaient là avant, et qui permettent aux enfants de se projeter. L’association organise des expositions qui sont centrées sur des mémoires vives.
D’autres questions concernant transmission et identité auraient mérité d’être abordées comme le choix du prénom des enfants et peut être les témoignages d’élèves et d’étudiants binationaux de catégories sociales différentes, d’enfants de réfugiés africains scolarisés dans la région Grand Est etc mais faute de temps, il a fallu passer à la remise des trophées.
Alain Bouba, l'organisateur
Alain Bouba a remercié le travail de toute son équipe et la présence compréhensive de son épouse à ses côtés pendant l’organisation de l’évènement. Des remerciements sont également adressés aux sponsors sans lesquels la diaspora n’aurait pu être honorée. Ainsi. Alain Bouba fait comprendre que les moyens financiers sont limités mais il ajoute : « J’aime la liberté de décider ce que je fais ».
La soirée du 7 décembre commence par la suite de la remise des trophées. L ’utilisation des écrans de la Salle Lafayette décorée en Palais blanc, permet d’afficher le nom des sponsors dont Orange Money Europe, pour n’en citer qu’un, qui a également fourni les T-shirts des serveuses et serveurs qui gagnent en visibilité pour le public qui souhaite commander des boissons et des plats cuisinés. Des séances photos sont également prévues pour immortaliser la soirée et les magnifiques tenues stylées des participantes. L’élégance féminine est très diversifiée selon qu’il s’agisse des femmes récompensées par un trophée comme la styliste qui a choisi robe et coiffe aux couleurs de l’Afrique et les robes flashy et moulantes des participantes du bal dansant ! La remise de trophées de satisfecit d’excellence à des acteurs et actrices de divers secteurs d’activité dans la région Grand Est se poursuit jusqu’à deux heures du matin. Puis c’est le DJ qui prend les commandes pour une soirée dansante qui se prolongera jusqu’à cinq heures du matin.
Mission accomplie pour Alain Bouba et son équipe qui pensent déjà à l’édition 2025.
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